Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
7 mars 2010 7 07 /03 /mars /2010 17:28
Toussaint-Louverture.jpg


Décidément, Haïti semble né sous une bien mauvaise étoile, et ne cesse de subir la néfaste influence des astres. (Ceci n’est pas un jeu de mot, mais bien l’étymologie de « désastre ».) Depuis son indépendance en 1804, suite à la révolte des esclaves menée par Toussaint Louverture, affranchi formé à l’art de la guerre par l’armée espagnole de St Domingue, le petit état est ballotté de cyclones en dictatures toutes plus violentes et corrompues les unes que les autres, toutes aussi peu soucieuses de l’intérêt général et du développement du pays. On se souvient de l’effroyable régime des Duvalier (les sinistres Papa et Bébé Doc) qui sévirent de 1957 à 1986, mettant le pays à feu et à sang avec les escadrons de la mort des tontons macoutes.
C’était bien la peine de batailler pour sa liberté, et finir enseveli sous la corruption, la tyrannie, la misère et les décombres d’un des séismes les plus meurtriers de l’histoire. Mais l’oncle Sam ne devrait pas tarder à remettre sous tutelle le tronçon d’île : l’aide est rarement gratuite. Après tout, si cela peut leur permettre de sortir de la spirale infernale dans laquelle ils dérivent sans fin.
Car les séismes émeuvent toujours l’humanité entière, comme figée dans la terreur ancestrale de la colère tellurique des dieux. En 1755, celui qui fit de Lisbonne un immense cimetière de ruines bouleversa toute l’Europe, et Voltaire en particulier, qui exprima son désarroi en plus de deux cents alexandrins, dans son  Poème sur le désastre de Lisbonne : 


« Accourez, contemplez ces ruines affreuses,
Ces débris, ces lambeaux, ces cendres malheureuses,
Ces femmes, ces enfants l’un sur l’autre entassés,
Sous ces marbres rompus ces membres dispersés ;
Cent mille infortunés que la terre dévore,
Qui, sanglants, déchirés, et palpitants encore,
Enterrés sous leurs toits, terminent sans secours
Dans l’horreur des tourments leurs lamentables jours ! »



Publié dans l'Hebdo du Vendredi le 22 janvier 2010
Partager cet article
Repost0
7 mars 2010 7 07 /03 /mars /2010 17:25
Guillotine-LouisXVI.JPG

Trois ans après leur coup d’envoi en 1789, les festivités de la Révolution Française battent leur plein. Le 10 août 1792, la famille royale est emprisonnée : le dauphin mourra dans son cachot après trois années d’une captivité effroyable entre paille moisie et rats avides, à l’âge de dix ans. « J’ai dix ans ! T’vas voir ta tête dans le panier… » aurait-il pu dire à son papa si celui-ci avait vécu un an de plus et s’il avait eu la radio dans sa cellule pour écouter la chanson de Souchon.
Mais le 15 janvier 1793, Louis XVI est déclaré coupable de trahison à la patrie après sa fuite interrompue à Varennes le 21 juin 1791. Condamné à mort deux jours plus tard, il est exécuté le 21 janvier 1793.
Pourtant homme de bonne volonté, beaucoup plus cultivé qu’on ne le dit, Louis XVI se voulait un despote éclairé sensible aux idées des Lumières, prêt à entendre les doléances du Tiers Etat. Mais il n’avait pas la fermeté intellectuelle nécessaire pour réformer le royaume et s’opposer aux résistances des nobles crispés sur leurs privilèges. La mauvaise réputation du couple royal auprès du peuple est d’ailleurs en grande partie due aux rancoeurs des courtisans.
Et si l’une des causes fondamentales de la Révolution, tout autant que la philosophie des Lumières, fut la hausse du prix du pain, peut-être aurait-il suffi que les seigneurs cèdent un peu de leur richesse pour sauver leurs têtes entêtées : c’est bien mal comprendre ses intérêts parfois que d’y tenir trop. Avis aux traders qui continuent de s’octroyer des commissions astronomiques et de spéculer sur le cours des matières premières après le sauvetage de la bourse aux frais des Etats.

Rappelons tout de même à titre comparatif que du 21 au 28 mai 1871, pendant la Semaine Sanglante, l’armée versaillaise d’Adolphe Thiers fit plus de morts en réprimant la Commune (entre 20 et 25 000 fusillés) que les exécutions de la Terreur en deux ans, d’août 1792 à juillet 1794.

Ndlr : Ceci n’est pas un article d’encyclopédie. Inutile donc d’en attendre la même approche.



Publié dans l'Hebdo du Vendredi le 15 janvier 2010




Partager cet article
Repost0
7 mars 2010 7 07 /03 /mars /2010 17:20


2010-Expo-FredProkop-007.jpg
 

Le Chevalier Bleu : coutures, nervures et autres blessures.




Jusqu’au 3 février, la galerie d’art, librairie et salon de thé Rose et son Roman expose les œuvres de Frédérique Prokop : sur tissu et papier, poésie aigre-douce à l’aiguille et à l’encre.

Il est peut-être des vies lisses se déroulant sans coups ni heurts. Des vies qui glissent à la surface sans se blesser, sans un accroc, sans jamais déchirer la blancheur des chemins bien tracés et des peaux enfantines.
Mais rares sont ceux qui traversent les ans sans s’y  égratigner ni se recoudre.
C’est la métaphore de la couture et du tissu que brode sans se lasser, Pénélope moderne, la plasticienne Frédérique Prokop. Car les mailles à l’envers sont aussi nécessaires que les mailles à l’endroit, elle tricote et défait, récupère et assemble les étoffes dont l’usure raconte une histoire, et les motifs une époque.
 « J’avais cinq ans et j’ai commencé à vieillir » confie la vieille petite fille au centre de la couverture, se souvenant de la gifle à la chevalière qui la marqua de son sceau écarlate, et des larmes qui ornent l’étoffe, constellations de perles sur fond de bleus.
On peut y voir des épidermes suturés comme des patchworks, inquiétants comme des secrets enfouis mais rassurants comme ces vieux édredons rapiécés qui témoignent qu’on peut vieillir et s’abîmer sans être jeté, que l’on peut demeurer au cœur d’un foyer sans plus avoir le brillant des vitrines.
Car ces coutures sont organiques : chaque suture est écriture. Un alphabet de cicatrices à déchiffrer dans les mémoires des épidermes, dessinant un nouveau contour, façonnant un nouveau relief.
Sutures mais aussi nervures : comme autant de lignes de forces, de vaisseaux par lesquels l’énergie circule, chaque fil noué est un lien de plus, un ancrage.
Sur un autre tableau, une femme s’enracine dans la terre irriguée par ses veines, et les branches de ses cheveux s’agrippent au ciel, comme pour ne pas se laisser toute entière absorber par le sol.

Plusieurs séries organisent l’exposition qui présente gravures, dessins, peintures et autres textiles : « Les vieilles petites filles », portraits issus de l’œuvre matrice sur courtepointe (voir photo) ; « Petits bobos et autres croûtes », papiers de soie ; « L’enfant », fusion mère et fils en rouge et gris, et d’autres encore que vous pourrez découvrir chez Rose et son roman, 76 rue Chanzy à Reims. 


Publié dans l'Hebdo du Vendredi le 15 janvier 2010
Partager cet article
Repost0
7 mars 2010 7 07 /03 /mars /2010 17:18
Asterix-sictransit.jpg


Au Moyen Age, soumettre un prisonnier à la question signifiait le torturer : doux euphémisme ! Aujourd’hui aussi, il peut arriver que la lecture de certaines questions constitue une douloureuse épreuve : pour le candidat malchanceux à un examen, ou même pour le convive des bombances gastronomiques que nos foies viennent de traverser.
Car il n’y a pas que dans les huîtres que l’on trouve des perles : dans les Apéricubes aussi. Amère étude : le fromage de l’inexpressif. Peut-être avez-vous remarqué en l’espace de quelques décennies une inquiétante évolution des questions figurant sur les petits cubes argentés. Une dérive qui pose question, justement.
L’histoire et la littérature ont presque entièrement disparu au profit du sport et du show-business. Afin de divertir les oiseux grignoteurs, ce n’est plus le Petit Robert qu’épluchent les rédacteurs de ces pelures d’aluminium, c’est le programme télé !
Pour notre contemporain moyen, la culture, ce n’est pas avoir une vague idée des pépites d’or de l’intelligence humaine qui sont parvenues à nous éclairer et nous construire par delà l’écume des siècles.
C’est connaître les derniers résultats sportifs ou les paillettes de pourriture télévisuelle qui auront rejoint le néant absolu que mérite leur inanité dans moins de dix ans au mieux. Henri IV ou Balzac n’ont aucune chance contre le dernier présentateur de la Star’Ac.
«O tempora, o mores ! Sic transit gloria mundi*. »
Les historiens savent bien que les déchets sont très révélateurs des civilisations qui les produisent. Avec notre société, les archéologues seront servis en abondance : dis-moi ce que tu jettes, je te dirai qui tu es. 
Pour connaître l’homme, sondez les reins et les cœurs.
Pour comprendre le consommateur, videz cendriers et poubelles. 
Anne Paulerville
 
* « Ô temps, ô mœurs ! Ainsi passe la gloire du monde. »

Publié dans l'Hebdo du Vendredi le 8 janvier 2010
Partager cet article
Repost0
7 mars 2010 7 07 /03 /mars /2010 15:24

http://a33.idata.over-blog.com/366x468/1/91/82/23//absintheberaud.jpg

Jean Béraud, L'absinthe


Certes, si le vieil an ne meurt, le nouveau ne peut naître. Mais avouez toutefois qu’il peut sembler étrange de se réjouir si bruyamment, à coups de pétards, de beuveries et de confettis, d’avoir un an de moins qui nous sépare de la mort, issue fatale et certaine de son bref passage sur terre. Pourquoi donc tirer tant de gloire d’avoir réussi à survivre un an de plus ? 
La mortalité infantile est depuis longtemps jugulée ; la peste, le choléra et les bombardements nous laissent en paix depuis de longues décennies : parvenir à voir l’an suivant ne constitue donc pas un exploit aussi impérissable que d’avoir réussi à se qualifier en trichant à la coupe du monde de la baballe au pied. 
Et puis, qu’y a-t-il de plus vide que le temps, cette entité purement abstraite, quantifiée du calendrier ? Si l’on ne peut célébrer que cette insignifiance-là, on n’ose imaginer la vacuité du reste de nos existences ! 
Mais c’est bien connu, plus on est creux, plus on fait de bruit : voyez les cloches (ou les pétarades des scooters dont on se demande parfois quelle boîte vide les casques protègent).
Que certains se croient obligés de faire le plus de bruit possible pour se prouver qu’ils existent malgré l’inconsistance de leur for intérieur n’a donc rien d’étonnant.
Et que dire des vœux, cette pratique qui consiste à se rappeler sur commande que ceux à qui l’on n’a rien à dire existent encore ? 
(Méchanceté gratuite et correction immédiate : fort précieux rituel qui permet de garder vivant un lien qu’il importe de ne pas rompre même si les années n’offrent pas d’occasions de rencontre.)
Les résolutions, enfin : combien sont-elles, celles qui demeurent d’une année sur l’autre, désespérément inefficaces, avec la persistance d’une tache tenace sur une nappe trop blanche ?

Mais l’espoir que l’an suivant sera plus doux que le précédent fait vivre. Nous vous la souhaitons bonne.


Publié dans l'Hebdo du Vendredi le 18 décembre 2009
Partager cet article
Repost0
7 mars 2010 7 07 /03 /mars /2010 15:18

Enfances-077.jpg



En cette période d’Avent, c’est, comme toujours, une débauche d’achats, une orgie de dépenses qui célèbrent bien plus la mécanique implacable de notre société d’hyperconsommation effrénée, que la renaissance de la lumière et la naissance, il y a deux mille ans, de celui qui l’incarne encore aujourd’hui pour des milliards de personnes. De plus en plus nombreux d’ailleurs sont les enfants qui ne savent plus ce que cette fête signifie : ce qui, bien au-delà de l’aspect religieux, est inquiétant du point de vue culturel.
Or, carte bleue et symbole font rarement bon ménage. Il suffit d’observer la mine penaude de ceux qui osent encore offrir un cadeau pas assez cher : « Oh, c’est symbolique ! » s’excusent-ils piteusement. Mais ça tombe bien, parce que Noël, justement, c’est un symbole ! Quelle coïncidence ! 
Et quel besoin avons-nous d’en rajouter avec ces présents qui iront encombrer des foyers déjà suréquipés de gadgets poussiéreux et alimenter un peu plus cette énorme machine à générer des déchets ? Pour les enfants, fort bien, quoique la valeur affective des jouets est inversement proportionnelle à leur quantité. Mais pour les adultes ! Quelle infantilisation ! 
Et combien sont-ils, les cadeaux qui font autant plaisir à ceux qui reçoivent qu’à ceux qui offrent, et qui ne confirment pas que l’enfer est pavé de bonnes intentions ? 
Mais en ce domaine aussi, l’amour est aveugle, et il est rare que l’on « tombe juste ».
Au lieu de nous ruer, toutes voiles et cartes dehors, dans les rayons trop achalandés de nos boutiques débordantes, pourquoi ne pas offrir des arbres ?
Non, pas un sapin coupé ! Plutôt le certificat délivré par un organisme ad hoc (facile à trouver sur Internet) qui atteste qu’on a bien financé la replantation d’un arbre dans une forêt ravagée. C’est bien, les arbres. Ca offre obligeamment son tronc prévenant aux amoureux qui s’étreignent, ça abrite du soleil et du vent, et ça fait respirer.
Plantez des arbres !



Publié dans l'Hebdo du Vendredi le 11 décembre 2009
Partager cet article
Repost0
7 mars 2010 7 07 /03 /mars /2010 15:12

 http://dubellay.ecoles.edu/reperes/reperes_histoire/reperes_histoire4_fichiers/image020.jpg 
 David, Le Sacre de Napoléon



Rappelons les faits, d’abord, à ceux qui auraient oublié que nous devons à la Corse le Code Civil, Austerlitz, la Bérésina, le GR 20 et des fromages tellement puissants que pour faire fuir les fonctionnaires d’Etat, les indépendantistes insulaires y gagneraient à les poser, bien inaccessibles, dans les doubles plafonds des administrations à la place des bombes. En plus, ils pourraient récupérer les locaux, après évacuation et désinfection.
Donc, le 2 décembre, c’est d’abord en 1804 que ça se passe, le jour où le premier consul Bonaparte se fait sacrer empereur, après avoir fait déplacer le pape, histoire de bien montrer qui est le chef. Un sacré jour : imaginez un peu la quantité de petits fours nécessaires pour nourrir tout ce monde. Cela expliquerait la taille du tablier de cuisine que traîne Joséphine. Seulement, il aurait fallu lui expliquer que c’est devant, que ça se porte, un tablier de cuisine. Sinon, ça ne sert à rien.
Le 2 décembre toujours, c’est aussi, en 1805, la fulgurante victoire restée dans l’histoire comme le « Soleil d’Austerlitz ».
Mais le 2 décembre, c’est aussi la date que choisit le neveu de Napoléon 1er en 1851 pour imiter son auguste césar de tonton : pourtant élu président de la toute jeune seconde république née en 1848, après 33 ans de Restauration de la monarchie qui succéda à la chute de l’Empire ("Waterloo, morne plaine"), il s’octroie les pleins pouvoirs par un coup d’Etat qui fonde le Second Empire en 1851. Napoléon III règnera ainsi jusqu’à la défaite de Sedan, en 1870.
Le XIXème siècle français est d’un comique ! En moins de cent ans, de 1789 à 1871, de révolutions en insurrections, ce ne sont pas moins de dix régimes politiques qui se succèdent, claquant les portes du pouvoir avec la même frénésie qui anime les maris jaloux dans les mauvais vaudevilles. Du haut de leur monarchie constitutionnelle multiséculaire, les Anglais peuvent rire.


Publié dans l'Hebdo du Vendredi le 27 novembre 2009
Partager cet article
Repost0
7 mars 2010 7 07 /03 /mars /2010 15:11
http://www.visiondurable.com/images/stories/photos_articles/avions_prestige_car_travel_co_uk.jpg


Chez les animaux, il y a les oiseaux migrateurs, les transhumances de troupeaux dans les alpages, les migrations en quête de meilleurs pâturages.
Chez les humains, la mobilité, c’est soit la liberté, soit la misère.
Liberté, car la possibilité de mobilité est une promesse, une respiration loin du quotidien étouffant.
 Misère, car la mobilité imposée est une oppression.
Symbole du luxe et source de plaisir lorsqu’il s’agit de s’offrir un peu d’exotisme ou de choisir l’automobile de ses rêves, la mobilité devient un cauchemar lorsqu’elle est une contrainte, et que la perspective de retrouver son nid douillet au retour n’existe plus. 
Alors, ce n’est plus un voyage, c’est un exil.
Certes, l’homme n’est pas un arbre : il ne meurt pas si on le déracine.
Mais il y a dans la mobilité forcenée de l’homme moderne une agitation insensée par laquelle il espère compenser son vide intérieur. 
Car la mobilité, ce sont aussi les délocalisations mortifères pour le tissu économique et social local, et aussi prodigues en émissions toxiques et gaz à effet de serre que le tourisme de masse.
La mobilité, pour le fils cadet d’une mère sahélienne, ça consiste à rejoindre un illusoire Eldorado européen dans la cale polaire d’un avion ou sur la coquille précaire d’un passeur avide au large de Gibraltar ou de l’Eurostar.
La mobilité, chez France Télécom, c’est l’impossibilité de construire un foyer : quitter sa maison, sa famille, ou arracher ses enfants à leur école, sa femme à son travail,…
La mobilité, pour un yaourt à la fraise, d’après une étude universitaire allemande, c’est un total de plus de 8000 km parcourus jusqu’au supermarché : des fraises de Pologne ou d’Espagne, le lait d’ailleurs encore, le plastique du pot de l’autre bout de l’Europe, etc… 
Homme libre, toujours tu chériras ta terre.


Publié dans l'Hebdo du Vendredi le 20 novembre 2009
Partager cet article
Repost0
7 mars 2010 7 07 /03 /mars /2010 15:08

http://www.studentsoftheworld.info/sites/pays/img/3989_La%20chute%20du%20mur%20de%20Berlin.jpg 
Le 9 novembre 1989, chute du mur de Berlin


Dans « protection », il y a « tectum » : le toit, en latin. Se protéger, c’est se construire un toit pour s’éviter des tuiles (« tegula », de la même racine).
Mais si les anciens craignaient que le ciel ne leur tombe sur la tête, nos contemporains redoutent plutôt les dangers horizontaux qui leur viennent de leurs semblables. Alors ce n’est plus tant des toits qu’ils érigent, que des murs.
Celui de Berlin est tombé il y a vingt ans, celui du ghetto de Varsovie il y a plus d’un demi siècle, la grande muraille de Chine fait figure d’antiquité, mais la construction murale reste encore très à la mode : entre les Etats-Unis et le Mexique, entre Israël et la Palestine,… 
Mais la hantise protectrice ne s’arrête pas à ces gros œuvres d’architecture raffinée : on aime aussi la protection rapprochée des masques chirurgicaux en cas d’épidémie, celle juridique des assurances et des parapluies législatifs en tous genres.
On n’arrête pas le progrès. On arrive même à construire des barrières à l’intérieur de nos corps : des barrières immunitaires, grâce aux vaccins, merveilleuse et salutaire invention de salubrité publique. Le léger problème, avec certains d’entre eux, comme celui contre la grippe A, c’est que le ciment avec lequel on les construit (en langage médical, cela s’appelle un adjuvant)  ne se contente pas de protéger contre un virus, mais peut aussi entraver à vie la libre circulation des millions de messagers cellulaires de notre organisme, et engendrer de graves problèmes de santé.
Alors mieux vaut attraper une brave grippe, moins virulente que la grippe saisonnière, et rester patraque quelques jours, que de se laisser inoculer un produit incertain dont le seul effet jusque là avéré consiste à enrichir des industries pharmaceutiques fort empressées. 


Publié dans l'Hebdo du Vendredi le 13 novembre 2009
Partager cet article
Repost0
7 mars 2010 7 07 /03 /mars /2010 14:56
http://vbzlxa.blu.livefilestore.com/y1pkar4lP_8aSexq0g8eokhE_T17ZBofBs0lher4arDqikxnSrKasJqNoCgkQCOee3bppVm0RxgNjwXLydVL5LtIw
Crédit Photo : Doisneau


 
Régulièrement, on nous parle de la réforme de l’ « ortograf ». Dernièrement encore, elle ressort des cartons.
Il faut bien, pour continuer à nier que le niveau baisse alors qu’une étude montre qu’ « en vingt ans, sur une même dictée, le pourcentage d’élèves qui faisaient plus de 15 erreurs est passé de 26 % à 46 % », changer l’unité de mesure pour obtenir le résultat qu’on souhaite. On est mauvais en orthographe ? Supprimons l’orthographe ! On a de la fièvre ? Cassons le thermomètre ! 
Car ce que certains prônent, c’est tout simplement d’écrire en phonétique. En « fonétik ». Youpi, écrivons tous en sms. Finie la beauté de la langue, son intelligence ! Pouah, cachez ces gros mots que l’on ne saurait ouïr !  « Trop prise de tête ! » Z’avez raison, mieux vaut penser avec ses pieds. La tête, ça sert à rien !
Certes, quelques bizarreries pourraient être aplanies. Mais dans leur immense majorité, les règles s’expliquent. Par quoi ? 
Par le bon sens et la logique ; par l’histoire de la langue et les évolutions des mots. Les difficultés n’en sont que les traces. Les gommer rendrait invisibles toutes les ramifications qui unissent les mots et révèlent leur sens caché, empêcherait toute réflexion de fond.
Cela ferait du français courant en un dialecte utilitaire, permettant d’acheter du pain et de parler de sa dernière soirée, mais en aucun cas d’exercer son esprit critique. Cela rendrait impossible la lecture de toute œuvre des siècles passés. Cela ferait du français littéraire une langue morte. Cela ferait de notre somptueuse langue, façonnée par plus de mille ans d’évolution, où s’écrivirent une part majeure des plus grands chefs-d’oeuvre de la pensée humaine, un patois de village. 
Comment mieux couper un peuple de sa culture et lui ôter ses moyens de réflexion pour en faire un mouton à consommer ?


Publié dans l'Hebdo du Vendredi le 6 novembre 2009
Partager cet article
Repost0

Anne Paulerville

  • : La danse du sens
  • : Ce site est un book en ligne où sont archivés la plupart des deux cents articles publiés dans la presse depuis octobre 2008. La consultation par catégories facilite la lecture.
  • Contact

Il paraît que le sens peut danser sur les mots


Ceci est un book en ligne. Y sont archivés la plupart des deux cents articles publiés dans la presse depuis octobre 2008, toujours au minimum une semaine après leur publication, afin d'y être consultés si besoin est.
La lecture par catégories facilite l'approche.

Nota bene
Ces textes furent rédigés pour une presse dite populaire : la prise en compte du lectorat limite donc l'usage des références culturelles et des figures stylistiques.



Recherche

Archives